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Philo Mermoz
24 février 2018

Platon et la transcendance des désirs

3. La transcendance du désir

 

images (4)

LA TRANSCENDANCE DES DESIRS

a) L’amour et la connaissance de soi

- Transition

Si on définit l'homme comme un être de pure raison alors pour devenir pleinement soi-même, il faut exercer sa volonté, lutter contre ses désirs, lutter contre les passions. De ce fait, la vertu consiste à rester maitre de soi en toutes circonstacnes, âtre pleinement soi-même.  Or, comment pourrait-on être pleinement soi-même si on commence par nier une partie de soi ? En outre, celui qui passe son temps à aller contre ses pulsions, contre ses désirs, est-ce qu’il ne nie pas sa vie ?

Or si vivre c'est désirer et que le désir est l'essence de l'homme alors plutôt que de lutter contre ses désirs, il faut, selon Calliclès, dans le Gorgias de Platon, vivre pleinement, toujours désirer plus et chercher à avoir plus. Or, l'illusion propre au désir, c'est de nous faire croire que c'est dans la satisfaction qu'on va s'épanouir alors qu'on s'y perd. Pourquoi ? Parce qu'on perd toute liberté, on devient l'objet de ses désirs. Et donc, on arrive à l'idée que l’on ne doit ni aller à l'encontre de ses désirs ni se laisser aller à désirer n'importe comment. Il faut donc apprendre à maitriser ses désirs.

- La maîtrise des désirs

On peut prendre trois images de Platon pour montrer comment on pourrait allier désir et raison : 

 

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- Le tonneau (Gorgias) : Platon compare l'âme à un tonneau. Supposons que j'aie un tonneau percé, quel que soit les efforts que je fais pour le remplir je suis condamné à l'échec. De même si mon âme est corrompue,  pervertie, quel que soient les efforts que je ferai pour satisfaire mes désirs et être heureux, mes efforts  seront vains. Voilà pourquoi de même qu'avant de chercher à remplir un tonneau, il faut commencer à en prendre soin, le réparer, pour ensuite pouvoir le remplir aisément, de même avant de satisfaire ses désirs, il faut d'abord prendre soin de son âme, il faut se connaître soi-même. La connaissance de soi est donc la condition du bonheur et une fois qu'on se connaît soi-même il devient facile d'être heureux.

attelage-ailé-2

Attelage (Phèdre) : Platon compare l'homme à un attelage composé d'un cocher et de deux chevaux ailés, un blanc un noir. Le cheval blanc est docile et il adore s’élever en revanche le cheval noir n'en fait qu'à sa tête et dès qu'il voit au sol un objet qui lui plaît, il fonce vers lui provoquant la chute de l'attelage. Platon insiste sur l'idée qu'il ne sert à rien de brimer en permanence le cheval noir parce qu'il va devenir de plus en plus rétif. En fait, il faut faire en sorte que les deux chevaux aient le même objectif. De même l'homme est un attelage composé d'une âme, d'une raison et de désirs. Il ne sert à rien de lutter en permanence contre ses désirs parce que soit on n’avance pas soit on tombe, il faut donc allier les désirs avec la raison. En clair, on ne peut pas être heureux si on commence par être ennemi avec soi-même. Pour être heureux il faut être en accord, en paix avec soi-même.

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Voilier (République, I) : Dans un voilier,  c'est le pilote qui doit utiliser la force des vents et des courants pour aller là où il veut. Supposons qu'il n'y ait pas de pilote,  le bateau va être à la merci des vents et des courants, il va finir soit par sombrer soit par s'échouer. De même,  en l'homme c'est la raison qui doit être le pilote. Un homme sans raison c'est comme un bateau sans pilote donc il finit par éhouer.  C’est la raison, en nous, qui doit décider et donc il ne faut pas se laisser emporter par ses désirs. De même que le bon pilote peut décider de naviguer contre vents et marées, on peut, si on juge cela plus raisonnable, décider d'aller en l'encontre des désirs mais cela au prix d'énormément d'efforts. L'idéal, pour Platon, c’est de savoir surfer sur la vague de nos désirs pour mieux se laisser porter et aller où l'on veut.

En clair, plutôt de voir les désirs comme un obstacle qui nous empêche de nous épanouir, devenir pleinement nous mêmes, il faut voir nos désirs comme une force qui nous permet de nous dépasser, d’aller au-delà de nous même pour nous réaliser.

 

- La connaissance de soi 

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Par conséquent, pour être heureux il faut donc savoir trouver l’harmonie, être ami avec soi-même. Mais le problème des hommes c’est qu’ils passent le temps à être en désaccord avec eux mêmes, et même pire, à s’ignorer eux mêmes. Voilà pourquoi, il est nécessaire de chercher a connaître soi-même.

Dans le Gorgias, justement, Platon va réfléchir sur ce que c’est se connaître soi-même, et il insiste sur l’idée qu’il y a une pluralité en soi. Il y a trois parties dans le soi, l'âme, le corps et tout ce qui se rapporte plus largement au soi. Ces trois éléments constituent ce que je suis. Ils sont essentiels mais ne sont pas aussi importants. L'âme est plus essentielle à la définition de soi que le corps, qui prime quant à lui sur tout ce qui se rapporte au soi ( positions sociale, métier, possessions, etc.). A chacune de ces parties, correspondent des biens qui pris ensemble constituent le bonheur.

Les biens qui correspondent à ce qui se rapporte à soi, sont les bins matériels. Les biens qui se rapportent au corps sont la santé et la forme. Dès lors, il n'y a pas à rejeter les biens matériels ni à les fuir mais comprendre que s'ils font partie du bonheur, ils sont moins essentiels que la santé et la forme, qui, eux-mêmes, passent après le bien le plus important, le souverain bien, le bien de l'âme.

Des lors, la question essentielle qu'il nous reste à examiner c’est qu’est-ce que le souverain bien ?

 Dans l'Alcibiade majeur Platon va justement chercher à répondre à cette question à travers une image: l'image de l'oeil. Platon va comparer l’âme a l’œil : l’œil c’est ce qui a la faculté de tout voir, mais qui ne peut pas se voir lui-même immédiatement. Il lui faut la médiation d’un miroir. Or, au fond de l’œil il y a justement un miroir, qui permet à celui qui me regarde en face dans les yeux de se voir lui-même. De même, l’âme a la faculté de tout connaître, mais qui ne se connaît pas elle-même, et qui ne peut se rapporter à elle même qu’a travers un miroir, quel est le miroir de l’âme ? Platon ici fait un jeu de mots : le mot grec choré, qui signifie pupille, désigne également la personne aimée.  . Autrement dit, c’est dans l’amour/amitié que l’âme s’apparaît à elle-même, qu’elle se connaît.

Apprendre+à+se+connaître+est+très+difficile+[

 

Donc, le désir, sous la forme de l’amour, est essentiel pour se connaître, pour bien être soi-même/s’identifier. Le désir est donc essentiel à l’âme, c’est le bien de l’âme. Voilà pourquoi, ce n’est certainement pas en s’opposant à ses désirs qu’on peut devenir pleinement soi-même, bien au contraire, le désir c’est ce qui permettra à l’âme de se réaliser.

 

 

Par conséquent, Platon va mettre en lumière la dimension positive du désir qui dans sa négativité est ce qui permet à l'âme de s'élever. Plus précisément, Platon va utiliser un mythe pour nous faire comprendre cette ambiguïté du désir : c’est le mythe de la naissance d’Eros.

b) L'ambiguïté du désir: Le mythe de la naissance d'Eros

PlatonnaissancedEros

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En clair, il y a une double nature du désir, il est vrai que c’est un manque d’être qui nous pousse à être insatisfait de ce qui est et de ce qu’on est mais c’et précisément cette insatisfaction qui va nous forcer à aller au-delà de ce qui est et de nous-même. Voilà pourquoi on parle de la transcendance du désir, il faut insister sur l’idée que le désir nous élève, vers l’absolu : le désir nous prend au plus bas de nous-même et nous fait gravir les échelons.

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Le désir va se porter sur un objet ici-bas, vers ce beau corps et donc je vais aimer une personne pour la beauté de son corps : mais de l’amour de ce beau corps je vais passer à l’amour des beaux corps. Et par-delà des beaux corps, on commence à aimer les belles occupations. Des belles occupations on passe à l’amour de la science et de la connaissance. De cet amour du savoir on passe à l’amour de l’absolu, à l’amour du beau lui-même. On retient donc que le désir élève l’homme vers la spiritualité, la beauté absolue, voilà pourquoi ce n’est pas en limitant ses désirs qu’on développe sa spiritualité, bien au contraire, c’est en se laissant porter par ses désirs.

 

Les paradoxes du désir (1/4) : Platon : le désir amoureux est-il raisonnable ?

Aujourd'hui, premier temps de notre semaine consacrée au désir. Et c'est à travers le Banquet de Platon que nous allons essayer de cerner un de ces aspects. Pour nous en parler, nous avons le plaisir de recevoir FulcranTeisserenc .

https://www.franceculture.fr

 

 

 

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